vendredi 3 septembre 2010

Carpe Diem

Aube. Soleil. Crépuscule. Lune. Aube. Soleil. Crépuscule. Lune. Aube ! Soleil ! Crépuscule ! Lune ! AUBE ! SOLEIL ! CRÉPUSCULE ! LUNE !
Bam. Babam. Bam babam. Bam ! Bam. Babam. Bam babam. Bam !


Cinq heures du matin. Le monde appartient à ceux qui se lèvent tôt. Je n'avais jamais compris le réel sens de cette expression. Pour moi, ça n'avait toujours voulu dire que "Si tu te lèves tôt, tu pourras faire plus de choses dans la journée !".

Bom. Bobom. Bom bobom. Bom ! Bom. Bobom. Bom bobom. Bom !

L'homme fait rebondir ses mains sur ses bongos. Ce rythme effréné apaise le jeune garçon, debout devant sa fenêtre, parce qu'il s'est levé tôt et qui, à présent, contemple le spectacle. La main quitte le cuir tendu. Sous l'effet de la pression, il était descendu dans le trou de son socle. Maintenant, il remonte, il retourne vers le ciel rougeoyant.
Bom !
Il est de nouveau descendu, la main s'est abattue sur lui. Mais déjà elle le quitte, et le cuir retourne vers le ciel.

Bom. Bobom. Bom bobom. Bom ! Bom. Bobom. Bom bobom. Bom !
Rapidité effarante. Cycle perpétuel qui semble ne jamais vouloir s'arrêter. Et l'homme musclé continue de frapper ses bongos. Et parce qu'il fait ce qui lui plaît, le monde lui appartient. L'enfant comprend, maintenant. Le monde appartient à cet homme parce qu'il fait ce qui lui plaît. Cet homme fait ce qu'il lui plaît parce qu'il s'est levé tôt. Parce qu'il s'est levé tôt, le monde lui appartient. Bientôt - trop tôt - le son des bongos s'estompera pour laisser place à celui des klaxons. Des milliers, des millions de klaxons hurlant à l'unisson pour se plaindre d'être frappé par des propriétaires énervés. Les morceaux de cuir tendus, eux, ne se plaignent pas. Ils respirent. Ils respirent parce que l'homme a la main ferme mais douce, qu'il est heureux, qu'il frappe de la bonne façon. Dans quelques heures, il aura revêtu un costume gris, noir ou bleu marine, avec une cravate, et s'énervera peut-être sur son klaxon comme des milliers d'autres autour de lui. Et le temps passe, et l'homme frappe ses bongos, continue de frapper ses bongos. Et le temps passe, et le musicien ne semble pas s'en inquiéter. Carpe Diem. C'est du latin. Ça veut dire "Profite du jour présent". Je l'ai appris à l'école. Enfin, au collège. Et le temps passe, et je grandis, et je suis déjà au lycée, et j'ai travail et je suis mort ! Mais calme, Carpe Diem, je ne suis que devant ma fenêtre, et le garçon regarde l'homme, et l'homme ne regarde pas le garçon, il frappe ses bongos, en rythme et cadence, et il frappe, et le monde lui appartient. Carpe Diem. Carpe Diem. L'homme semble l'avoir compris. Profite du jour présent, et continue de nous frapper, et continue de nous regarder et de nous écouter, de nous entendre, de dormir, de discuter au téléphone, le monde t'appartient parce que tu t'es levé tôt. Continue de nous frapper ! s'écrient les bongos. Continue, ne t'arrête pas, profite du moment présent et ne pense pas à la suite ! Ouvre ta fenêtre, profite de la douce chaleur du soleil pendant qu'il ne fait pas encore trop chaud, et prend ton temps, savoure chaque instant de ta vie, car tu ne les revivras pas. Savoure les instants, profite du moment présent, ouvre ta fenêtre et écoute-nous en goûtant la chaleur matinale du soleil sur ta peau jeune et frêle.

Bom. Bobom. Bom bobom. Bom ! Bom. Bobom. Bom bobom. Bom !
Et les bongos continuent de chanter, de chanter l'espoir, de chanter le cycle du jour et de la nuit, de chanter Carpe Diem, de chanter tout ce qu'il leur plaît, car le monde leur appartient, car ils se sont levés tôt. Moi, j'ai ouvert ma fenêtre. J'ai goûté les rayons matinaux du soleil. Ils sont pour toi, m'a-t-il dit. Parce que je t'appartiens, parce que tu t'es levé tôt. Bientôt, je vais devoir éclairer ton peuple, et tu ne pourras savourer mes rayons, car ils ne te seront plus destinés, mais destinés à toute une population. Mais tu es le maître du monde pour quelques instants, alors profite de ce moment magique et de ces rayons.
Bom. Bobom. Bom bobom. Bom ! Bom. Bobom. Bom bobom. Bom !
Et, puis soudain, sans prévenir, il se met à pleuvoir. Mais il ne pleut pas de gouttes d'eau démoralisantes. Non, il pleut des mots. L'enfant ne peut les comprendre, ils sont prononcés dans un dialecte qu'il ne connaît pas, mais ce sont des mots tendres, chaleureux, des mots qui brillent comme des étincelles avant de s'envoler et de se confondre avec l'air chauffé par le soleil.
Six heures. Comme le temps passe vite ! Mais tu ne dois pas t'en inquiéter. Carpe Diem.
Carpe Diem. Carpe Diem ! CARPE DIEM ! AUBE ! SOLEIL ! CRÉPUSCULE ! LUNE ! AUBE ! SOLEIL ! CRÉPUSCULE ! LUNE ! AUBE ! SOLEIL ! CRÉPUSCULE ! LUNE ! Aube ! Soleil ! Crépuscule ! Lune ! Aube. Soleil. Crépuscule. Lune. Aube... Soleil... Crépuscule... Lune... Soleil... Crépuscule... Lune.

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